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1001 histoires avec ATD Quart Monde

La misère n'est pas une fatalité

Écoutez ou relisez les "31 histoires pour un monde autrement" éditées par ATD Quart Monde Grand Ouest et Histoires Ordinaires

Ils décident avec ou sans nous ? (p.78)


Mardi 11 Juillet 2017

ils_decident.mp3 ILS DECIDENT.mp3  (7.59 Mo)


A l’approche des élections, l’Université Populaire Quart-Monde Grand Ouest a décidé de réfléchir sur la place de chacun comme citoyen dans la société.
 
Le 3 mars 2012, 73 personnes se rassemblent à Laval (Mayenne) pour réfléchir sur le thème : « Comment se prennent les décisions qui nous concernent ? Avec ou sans nous ? » L’adjoint au maire était notre invité.

Evelyne raconte : « Une fois on est allé aux vœux du maire. On n’était pas à l’aise, on ne se sentait pas à notre place. Il y avait dans le regard des autres….

On s’interroge en groupe : « Qu’est-ce qui permet de se faire entendre. ? »

Les idées et les pratiques se dévoilent : il faut s’informer pour pouvoir choisir et agir. Il faut montrer qu’on est là, se faire entendre. Il faut donner l’occasion de rencontres. En groupe, on est mieux entendu. Il faut se rassembler en association, être soutenu quand on a du mal à exprimer ses idées.

Marie-Jo dit : « Chacun, d’où qu’il vienne, a une pensée, un vécu, une expérience qui ont de la valeur, et donc, en mettant tout ça ensemble, on arrive à bâtir quelque chose. »

Éric : « J'aimerais qu’en milieu rural, on puisse écouter les gens en dehors des élections. »

Sonia : « Les politiques, c’est bien beau ce qu’ils nous proposent, mais, s’ils ne vivent pas à nos côtés, ils ne peuvent savoir ce qu’on vit. »

L’adjoint réagit : « Etre citoyen, c’est bien sûr exprimer ce qu’on ressent, mais c’est aussi échanger avec les autres et porter une parole près des élus. »

Il est impressionné par la tenue du débat : « Dans les réunions de quartiers, on ne dépasse pas toujours les problèmes de trottoirs. Mais j’ai entendu aujourd’hui des sujets bien plus importants. Il ne devrait pas y avoir de honte, il ne devrait pas y avoir de réticence de votre part à venir aux réunions.

A cette rencontre, les élus présents ont pris conscience de la difficulté pour certaines personnes, d’aller dans les structures qui leur étaient normalement ouvertes.

Il a donc été décidé de mettre en place une co-formation (1) de quatre jours entre les directeurs de maisons de quartiers, des animateurs de l'épicerie sociale, un responsable du CCAS et des militants d’ATD Quart-Monde. Le thème de cette co-formation : Comment faire venir les habitants à la maison de quartier en particulier ceux qui n'osent pas franchir la porte ou ceux qui ne reviennent pas après un premier contact.

On a constaté que les professionnels proposaient rapidement des solutions quand il y avait problème sans chercher à écouter où étaient vraiment les problèmes par des gens qui les vivaient. 

On a cherché ce que chacun mettait derrière les mots. Le premier jour a été très difficile parce que chaque groupe (professionnels/militants ATD Quart Monde) était méfiant vis-à-vis de l'autre et les militants avaient le sentiment de ne pas être écoutés et entendus par les professionnels qui restaient avec leurs certitudes et leurs propositions même si elles ne sont pas adaptées.

On a travaillé sur comment aborder les difficultés : Les professionnels arrivent avec leur logique pour résoudre les problèmes et les militants, eux, se disent comment comprendre et faire comprendre les problèmes en vue de les résoudre. Les militants ont trouvé que les professionnels mettaient rapidement une étiquette sur les gens sans chercher à les connaître davantage.

Le troisième jour, une écoute réciproque et apaisée s'est installée et on a beaucoup travaillé sur l'importance du premier accueil qui doit d'abord permettre d'écouter avec bienveillance et pas tout de suite proposer des solutions. Les professionnels ont réalisé l'importance de mettre de la convivialité dans la première rencontre pour mettre en confiance. Il n'est pas forcement obligatoire de donner une solution dès la première rencontre. 

Les militants ont réalisé qu'il ne fallait pas se braquer d’emblée vis à vis des professionnels qui ont aussi des comptes à rendre à leur hiérarchie mais qu'il fallait rester ferme dans la façon de faire reculer l'exclusion pour ne pas laisser quelqu'un sur le bord de la route. Les gens ne sont pas des « cas » à régler. « Nous avons renforcé notre position qu'il ne faut pas faire à notre place mais avec nous ».

Une professionnelle dit : « Moi j'ai appris beaucoup de choses sur l'écoute, les a priori ; je pensais que je n'avais pas forcément besoin au départ de cette formation car j'avais travaillé en insertion ; je pensais que j'associais les bénévoles, je leur donne une place, mais bien souvent cela a consisté à porter des caisses, des barrières, mais donner une place au sein d'une organisation et accompagner le bénévole dans ce projet, là je me dis que je n'y suis pas encore ! »

Une militante dit : « Merci de nous avoir écoutés même si on vous a secoués un petit peu les premiers jours... Ce n'est pas pour juger votre travail mais pour dire qu'il y a des choses à changer, des regards, des manières de faire et surtout faites confiance aux bénévoles ! »

Depuis nous avons constaté des changements et des avancées dans les maisons de quartier au niveau de l'accueil des habitants.

Simone et Jean

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